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La vie errante

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Mes goûts et mes couleurs


L'homme qui aimait les chiens - Leonardo Padura

Publié par Thierry L. sur 15 Août 2016, 07:32am

Catégories : #Dévoré

(Où comment un coup de piolet peut fissurer un crâne et bien des certitudes...)

Une tête, un bras, un œil et une arme.

La tête, celle de Lev Davidovitch Bronstein, dit Trotsky. Le révolutionnaire soviétique, prompt à justifier la violence politique et la terreur, à l'origine des premiers camps de concentration en Russie, se retrouve dès 1928 en exil : son opposition à Staline le transforme en juif errant. De la Turquie au Mexique, le lecteur le suit et s'attache à cet homme, pur dialecticien, qui mènera un combat à mort avec le Père des peuples dont l'ombre délétère s'étend alors partout.

La main, celle de Ramón Mercader, militant communiste catalan. Recruté dès 1936 par la police politique de l'URSS, le NKVD, Mercader, qui aurait pu devenir un héros de la guerre d'Espagne, connaîtra son heure de sombre gloire en devenant le meurtrier de Trotsky. Assassin et victime tout à la fois, la trajectoire de Mercader est d'une bêtise confondante et d'une tristesse absolue.

L’œil (de Moscou) c'est celui du véritable héros du roman : Staline, ogre maléfique, "Voldemort" d'une époque révolue (?), dont le nom suffit à instiller l'épouvante. Il est le diabolus ex machina de cette terrifiante Histoire.

L'arme, enfin, le piolet dérisoire brandi par Mercader mais aussi le témoignage qu'Iván Cardenas Maturell, écrivain cubain écrasé par sa propre médiocrité tente d'ériger en mémorial contre le Communisme, cette utopie devenue cauchemar, cette imposture, ce "cirque où avaient tant résonné les coups de fouet et où avaient si souvent dansé les clowns, avec leurs sourires figés".

Très documenté, le roman qui mène en parallèle les vies de Trotsky et Mercader jusqu'à ce jour d'août 1940 où le second va éliminer le premier est captivant. Habilement construit, plein de chausses-trappes, le récit nous balade d'un bout du monde à l'autre et nous fait croiser Diego Rivera, Frida Kahlo ou André Breton. Il dit également le désenchantement de ces militants communistes, revenus de toutes les trahisons et dont la vie entière fut bâtie sur des mensonges.

L'un des atouts de L'homme qui aimait les chiens ce sont ces personnages invraisemblables que l'on y croise : comment croire que des figures aussi "extra-ordinaires" qu'Africa de las Heras, Caridad Mercader ou Leonid Eitington puissent avoir existé en dehors de l'imagination folle d'un romancier ? Pourtant Padura a simplement (mais avec quelle maestria!) colorisé de vieux clichés en noir et blanc : la réalité ici a dépassé la fiction.

Une lecture hautement recommandable.

Merci Corine

L'homme qui aimait les chiens - Leonardo Padura
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