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"Tout ce qu'on peut savoir quand on ne sait rien, je le sais."
Marguerite Duras, dans La Douleur -texte essentiel-, tient la chronique du retour des camps de son mari Robert Antelme : la torture de l'attente, l'affliction des retrouvailles et l'espérance de la résurrection dans un récit dépouillé jusqu'à l'abstraction.
En 2008, Patrice Chéreau affronte cette incandescence et y dirige Dominique Blanc. La comédienne, hantée par ce moment charnière dans sa carrière, reprend aujourd'hui la mise en scène sobre et limpide du maître et nous offre la chance de l'applaudir dans ce morceau de bravoure.
Quelques chaises, une table, une pomme... Blanc/Duras vide son sac au propre comme au figuré dans cette impitoyable épure d'une angoisse ontologique, celle, viscérale, de la mort de l'autre, de sa corruption et de sa douleur.
Sans le moindre effet, la comédienne s'efface derrière la force d'un texte qu'elle délivre avec une humilité et une rectitude impressionnantes. La catharsis qu'elle réalise par le flot continu d'une souffrance ainsi exposée explose dans le dernier quart de la pièce. Après l'horreur de l'attente et de l'imagination du pire, l'inhumaine vérité nous éviscère. Dans ce déicide ultime qu'est l'extermination nazie, ce Lazare revenu des limbes hurle à s'en déchirer la gorge. Dominique Blanc, médium du désespoir, nous inflige une part de cette douleur inextinguible.
Merci Madame.