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Je découvre 1984 (n'ayant ni lu le roman d'Orwell*, ni vu les films d'Anderson ou de Radford mais connaissant le propos de l'auteur) avec cette adaptation graphique de Fido Nesti dans la traduction de Josée Kamoun.
Horrifique, ce requiem en gris et orange sidère par la violence de son contenu. Dans cette dystopie, on découvre un monde broyé dans la poigne de fer d'un régime totalitaire qui s'attaque principalement à la langue humaine et aux pensées individuelles et collectives.
Évidemment Orwell se basait sur ce qu'il connaissait/pressentait du stalinisme, du nazisme ou du communisme chinois. L'univers qu'il imagine -abstrait à force d’annihilation- fait écho à notre monde actuel et le travail de relecture de Fido Nesti bouleverse par ce qu'il laisse surgir de parallèles effectifs. En découvrant le chemin de croix de Winston Smith, pulvérisé par Big Brother et ses sbires, on évoquera par exemple la Corée de Kim Jong Un, les dérives complotistes (avec leur novlangue balbutiante et leur dictature de la désinformation), les aberrations scientifiques (avec les recherches sur l'immortalité ou sur le lavage de cerveau) ou encore l'ubiquité des écrans et de l'intelligence artificielle. On pense aussi à une Dorothy hallucinée découvrant derrière son rideau émeraude le vrai visage du magicien d'Oz : celui de la mort souveraine et de l'éradication de toute humanité.
Le dessin de Fido Nesti est peu aimable, volontairement raboteux mais colle parfaitement au désespoir total qui suinte de l’œuvre. Les cases se chevauchent et enferment dans la paranoïa ambiante le lecteur, les phylactères l'asphyxient ou, évanescents, lui insinuent le pire. Cet album donne surtout une envie formidable de lire le texte originel.
Un cauchemar nécessaire, un appel à la vigilance. Magnifique !
*Je ne suis donc pas légitime pour chroniquer la qualité de l'adaptation.
Merci Corine.