
Autre Sésame fameux : "Le pépiement matinal des oiseaux semblait insipide à Françoise."
Tel l'Ulysse d'Homère, le lecteur, succédané du Narrateur proustien, poursuit son voyage initiatique en abordant le troisième volume de La Recherche.
Kaléidoscopique, le roman se diffracte. Il nous mène d'une chambrée militaire à un salon aristocratique, sublime le trivial, trivialise le sublime, déclenche le rire et les larmes, fixe l'indicible... Dans cette Passion aristocratique, Proust nous propose les premières stations d'une montée vers le (Gol)Gotha mondain.
Le Côté de Guermantes explore des terres inconnues mais idéalisées. Oriane, duchesse aux yeux myosotis et à l'esprit mordicant, telle une Circé d'opérette, règne sur l'îlet du faubourg Saint-Germain : las, les pourceaux qui l'adorent piétinent leurs Noms aux résonances fabuleuses et laissent apparaître leur banale humanité ; la fée n'est qu'une femme.
Livre du désenchantement -nos illusions ne gagnent jamais à se frotter au réel-, Guermantes est aussi celui de la mort qui rôde. L'agonie d'une grand-mère ou la maladie fatale d'un vieil ami déplorent l'enfance enfuie et assombrissent les diaprures d'un style incomparable.
Dois-je le préciser, Proust, aède aux chants aimés, est l'écrivain suprême : chacune de ses phrases, ciselée, intaillée puis pourléchée, abreuve et sustente, cycéon revigorant. Au delà d'un roman, La Recherche est le vade-mecum ultime : l'écrivain prophète met de l'ordre dans nos balbutiements et sa parole console, guérit, accompagne, révèle...
Mon bréviaire.