
Zweig, dans cette longue nouvelle, use (abuse ?) une fois encore du procédé des écrits posthumes tombés par hasard entre ses mains. Cette fois, le gommeux qui est sensé prendre la plume nous décrit par le menu une nuit qui a transformé son existence. Dragueur invétéré, il profite d'une balade au Prater pour lever sa future proie : il jette son dévolu sur une replète et effrontée aguicheuse et à la suite d'un curieux hasard dérobe, au barbon de la coquette, le ticket gagnant d'un pari sur une course équestre. Échauffé par ce larcin, il s'enfonce alors dans les recoins du parc viennois et glisse progressivement vers des plaisirs plébéiens... Il découvre en lui des flots d'amour dont il ignorait tout, blasé et indifférent aux autres qu'il était jusqu'alors.
Je n'ai pas aimé ce pensum : l'écriture de Zweig se complait dans une vulgarité qui dessert son propos ("J'éprouvais une sorte de vertige intérieur, je me répandais avec la même jouissance que dans le ventre d'une femme (...)") et son "idiot" onaniste n'approche à aucun moment la grâce du Prince Mychkine. La machinerie finit par tourner en rond, aussi vide de sens que la course d'un hamster dans sa roue. Le narrateur, triste sire, exsude la mauvaise foi et l'autolâtrie et son altruisme présumé a tout d'une imposture.
Les affres existentielles du baron Friedrich Michael von R..., sombre corniaud, m'ont plongé dans une indifférence marmoréenne. Désappointé!